Séduction

Elle était belle.
Elle était douce.
Elle était blonde.
Elle était sage...

Sous son blanc chemisier, ses petits seins mignons
Soutenaient mon regard, adorables fripons !
Sous sa jupe plissée, cuisses fines et dorées
Espéraient le zéphyr qui voudrait les montrer.
Insolent cache-cache, propice à me narguer !

Ses yeux rieurs m'étaient une invite câline,
Ses cheveux, aux épaules, jouaient les pèlerines,
S'insinuant parfois dans son décolleté,
Histoire d'attirer l'œil et de le titiller.
Un air d'ado, juste un air : femme, et libérée !

Regards, sous-entendus, séduction, jeu...

Elle était sage.
Elle était blonde.
Elle était douce.
Elle était belle...

Un soir, derrière sa chaise, pendant qu'elle lisait,
J'osai prendre ses mèches pour les lui relever
Et contempler sa nuque, elle aussi bien hâlée.

Mon intention était honnête... enfin, je le croyais !

Leur odeur m'envoûtait, leur soyeux me perdrait.

Feignant l'indifférence, se laissant caresser,
Je la sentis bientôt doucement frissonner.
Quittant alors son siège, pour à moi s'adosser,
Offrir son tendre cou à ma bouche hésitante,
Emportée par l'émoi, enivrée, consentante.

Palpitations, corps contre corps, chamade...

Elle était blonde.
Elle était belle.
Elle était douce.
Elle était chaude...

Sentant, sans doute aucun, mon désir s'amplifier
De la serrer plus fort, dans mes bras enlacée,
Elle se tourna vers moi, les yeux enamourés,
Saisissant mon visage en ses mains énervées
Pour enfin boire mes lèvres, ainsi qu'elle en rêvait.

© Robert Gastaud, janvier 2008

 

Un texte en vedette

Mémé Naïs m'a tant raconté de choses que, parfois, je me demande si ce n'est pas elle qui pense à travers moi ! Souvent, je m'évade, ne sachant plus trop si je plane encore à faire la course avec les papillons ou si je saute de branche en branche avec mon ami l'écureuil, si je suis moi, si je suis elle.

C'est vrai que j'aurais aimé vivre la vie simple, pourtant rude, de Mémé Naïs. C'est vrai aussi que j'en ai surtout retenu les bons moments et oublié les contraintes, peut-être parce qu'elle en parlait moins.

J'habite la ville, et nous ne retournons pas souvent au village. Quand j'étais petite, alors que la route était moins bonne et que nous mettions plus longtemps pour le rejoindre, nous y allions souvent, mais maintenant...

Nous nous arrêtions en chemin pour acheter des croissants croustillants comme on n'en trouvait nulle part ailleurs. Un peu plus loin, impossible de ne pas s'arrêter à La Bastide, pour y prendre, chez le boulanger qui était presque devenu un ami, du pain de campagne cuit au feu de bois, d'un goût incomparable : un plaisir si simple ! Et quelle tristesse lorsque, par malheur, la boulangerie était fermée ou que « notre » pain avait été dévalisé par des touristes de passage !

Je me souviens d'une anchoïade comme jamais je n'en ai mangé depuis : ce pain de campagne, coupé en deux, réchauffé doucement dans la cheminée, jusqu'à ce que la mie commence à croustiller, puis tartiné de cette pommade préparée avec amour par la cousine et remis à griller près des braises. Ce parfum de pain chaud, d'anchois, d'ail et d'huile d'olive, ce croustillant... j'en salive encore ! Un plaisir si simple...

Moi, je ne rêvais pas d'être une enfant de la ville, ni de ressembler à la fille du châtelain, que Mémé Naïs n'enviait pas, et qui, dans les rues du village ou dans les champs, aurait autant crotté ses vêtements que les autres, et n'avait donc pas la liberté des petites paysannes, sa gouvernante veillant au grain. Que je la plains, moi aussi ! Je rêvais d'être une enfant du village, courant les champs seule ou avec les filles et garçons de mon âge, marchant pieds nus dans la mousse si douce ou dans l'eau glacée du ruisseau, pêchant à la fourchette la truite qui se cache au milieu des racines, à l'affût dans les trous sous la rive, et la faisant griller aussitôt, avant d'aller cueillir quelques fraises des bois ou des framboises, ou bien, un peu plus tard dans la saison, de délicieuses noisettes que l'on trouve plus haut en grimpant vers la crête.

Alors le soir, je m'assieds sur mon lit, dos au mur, je prends un bon gros coussin que je cale sur mon ventre et que j'enserre comme Mémé Naïs m'enlaçait pour me raconter ses histoires, j'éteins la lumière et je pars courir là-haut, dans le village et dans ses prés. Je vais revoir mon ami l'écureuil facétieux ou chercher les champignons, j'espère y trouver moi aussi mon Louis...

© Anaïs - Juin 2008

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